Voilà un nouvel avatar de cette société dont le
site est implanté à Aix les bains depuis des décennies. Ce site est passé par
différentes identités : à commencer par La Savoisienne, puis
Alsthom-Savoisienne, puis Alsthom-Atlantique, puis Alsthom, puis GEC-Alsthom,
puis Areva et enfin Alstom (sans H) et Alstom-Grid.
Depuis le mois d’octobre 2015, c’est sous la
bannière de General Electric que le site aixois se place désormais. Le
conglomérat américain a en effet mis la main sur les différents sites d’Alstom
en Europe et sur celui qui nous intéresse ici, à Aix, en particulier.
Quelques centaines de suppressions d'emplois
La méthode de gestion américaine n’a pas tardé à
s’imposer. Quelques semaines après avoir officiellement pris toutes les
commandes du groupe, General Electric a convoqué les syndicats pour leur
annoncer la prochaine suppression de 6 500 postes en Europe, dont près de 800
pour la seule France. Curieusement, à cette annonce, on n’a pas entendu les
protestations du gouvernement socialiste dont les représentants étaient si
prompts à dénoncer les licenciements boursiers quand ils n’étaient pas encore
au pouvoir. Il est vrai qu’on n’a pas entendu non plus l’opposition de
droite...
Mais revenons au plan local et au site aixois qui devrait d’autant moins être épargné que General Electic envisage surtout de supprimer des postes dans les emplois industriels, principalement dans les secteurs énergie et dans les réseaux Grid. Or c’est justement la base de l’activité locale aixoise.
Bien avant cette annonce officielle, une certaine
agitation parcourait déjà les allées du site de la rue Paul Doumer, faisant
parfois courir les rumeurs les plus folles. Ainsi, certains allaient même
jusqu’à confirmer la présence d’agent de la CIA dans les bureaux aixois... Comme
si tout personnage en costume gris avec l’accent texan était obligatoirement
membre du renseignement américain. Il est vrai qu’en rachetant Alstom les Américains,
plus que des usines facilement transportables, ont surtout acquis un véritable
savoir-faire dans un domaine très pointu. De ce point de vue, Alstom, grâce à
une technologie très avancée, avait su se faire une réputation internationale.
Dès lors il semble légitime que les nouveaux propriétaires veillent à ce
qu’aucun transfert de technologie ne puisse profiter à la concurrence. D’où un
climat de suspicion qui, semble-t-il, n’existait pas du temps ou l’entreprise
était encore franco-française.
Quand Alstom tousse, c'est Aix les Bains qui s'enrhume
Au delà de ce climat, c’est l’avenir du site aixois qui est en jeu. Si pour l’heure il n’est question que de 800 licenciements répartis sur toute la France, d’aucuns redoutent qu’à terme, et compte tenu des différences de coûts de production pas à l'avantage de l'Hexagone, les nouveaux propriétaires n’hésitent pas à transférer les technologies françaises vers d’autres cieux, avec, bien entendu, des fermetures de sites à la clef. Or, Alstom est le plus gros employeur privé du bassin aixois. Autant dire que si demain Alstom tousse, c’est Aix les Bains qui va se sentir enrhumé. Si, économiquement parlant, le danger existe, politiquement il va devenir un casse-tête. Le député-maire ex UMP n’a pas hésité naguère à se vanter de la création d’une centaine d’emplois sur le site et en a tiré gloire. Si la tendance venait à s’inverser, il se retrouverait, ipso facto, comptable des pertes d’emplois.
Paradoxe des paradoxes, le rachat d’Alstom par le groupe américain General Electric vient mettre en exergue certains rapprochements ou une grande perméabilité entre le monde politique et le monde économico financier international. Il se trouve en effet que la présidente pour la France du groupe General Electric s’appelle Clara Gaymard.
Pour l’état civil, Clara est l’épouse de Hervé Gaymard, l’ancien ministre des Finances, actuel président du Conseil départemental de la Savoie, et compagnon de parti politique du député-maire d’Aix les Bains. C’est dire si ce dernier marche sur des œufs.
Car la question va inévitablement se poser : la vente d’Alstom
au conglomérat américain sera-t-elle profitable ou préjudiciable au site d’Aix
les Bains. Bien sûr on connaît déjà l’attitude de nos « zélées
zélites » : quand tout va bien, c’est grâce à eux, si ça va mal, ce
sera de la faute des autres. Restera plus alors qu’à désigner qui sont les autres.
Enfin, de là à supposer que l’arrivée opportune à Aix les Bains de Elis et de ses prétendus 190 emplois dans une super blanchisserie industrielle que personne ne réclamait pourrait servir à compenser l’effet Alstom, il n’y a qu’un pas que certains n’hésiteront sans doute pas à franchir.
Illustrations:
Ci-contre, article paru dans le Canard Enchaîné du 27 janvier 2016
Plus haut: article paru le 13 janvier 2016 sur le site de Les Echos