Après Pénélope Fillon, Isabelle Dord ?

Les profiteurs de la république n'ont plus aucun complexe


Dans son édition de ce mercredi 25 janvier, le Canard Enchaîné a lancé un sacré pavé dans la mare. L'épouse du rigoureux (sic) et sourcilleux (re-sic) François Fillon aurait touché quelque 500.000 euros (en huit ans) pour un travail (fictif ou supposé) d'assistante parlementaire:



Depuis cette annonce, tout le microcosme politico-affairiste, soudain affolé, bruit de fausse candeur et d'indignation affectée.

Il y a surtout ceux qui osent avancer qu'il n'y aurait rien d'illégal, pour un parlementaire, à employer son conjoint comme assistant(e). Mais ceux-là oublient de préciser que si ce n'est pas "illégal" c'est uniquement parce que les mêmes parlementaires, ceux qui votent la loi, ont toujours refusé de dire que ce genre d'emploi était illégal (alors qu'il l'est partout ailleurs en Europe). Or, à défaut d'être foncièrement illégal, ce genre d'emploi familial de complaisance apparaît immoral à la majorité des simples citoyens.

Un député dispose d'une enveloppe nette d'un peu plus de 9.000 euros par mois pour payer des collaborateurs (les cotisations sociales étant prises en charge par un autre budget de l'Assemblée).

Qu'un député puisse prélever, sur cette enveloppe, ne serait-ce que quelques centaines d'euros pour rémunérer, à un salaire décidé par lui, son épouse est tout simplement scandaleux. Et cela, qu'il s'agisse d'un emploi réel ou fictif!
Car personne ne peut imaginer qu'un député pourrait exiger de sa femme un rendement et une assiduité au travail comme il en exigerait d'un collaborateur extérieur.
Partant de là, ce genre d'emploi devrait être tout simplement interdit. A défaut, tout parlementaire, à la fois intègre et soucieux de l'image qu'il renvoie, devrait s'abstenir d'avoir recours à des membres de sa famille pour être ses assistants salariés (aux frais des contribuables).

Aussi, quand le candidat à la présidentielle Fillon, celui qui a "sucré" les retraites, celui qui nous promettait de nous serrer la ceinture, celui qui nous annonçait des sacrifices financiers, quand ce donneur de leçons de rigueur vient de se faire prendre à ce petit jeu, voilà qui est révélateur de l'état de déliquescence dans lequel a sombré le monde politicien français.

En ce domaine, on peut dire que F. Fillon a fait école. Son disciple, Dominique Dord, a suivi le même chemin.

Rappelons que Dord, en sa triple casquette de député, maire et président de l'agglo, perçoit des indemnités (ouvrant droit à retraite) plafonnées à un peu plus de 9.000 euros nets par mois. A quoi il faut ajouter une enveloppe d'un peu plus de 6.000 euros mensuels pour de pseudos "frais de représentation", une somme, elle, non imposable. On dit "pseudos" frais car le député est dispensé de justifier l'emploi de ce pactole et il en fait ce qu'il veut. Quand on sait que tous les frais de transport, de communication ou de secrétariat d'un député sont pris en charge par l'Assemblée et que, quand il est à Aix, Dord bénéficie, entre autres avantages, d'une voiture de fonction et d'une carte de carburant et d'autoroute, et qu'il a parmi le personnel municipal des assistants payés par les contribuables locaux, on se dit que ces 6.000 euros ressemblent fort à de l'argent de poche.
Voilà donc un type qui perçoit chaque mois quelque 15.000 euros nets aux frais des contribuables. De quoi vivre décemment, n'est-il pas?

Eh bien cela ne lui suffit pas.

Lui aussi, comme son maître à penser Fillon, il emploie son épouse Isabelle en qualité d'assistante parlementaire. Cela apparaît d'ailleurs sur sa déclaration officielle de situation à la HATVP:


Eh, oui. Isabelle, l'épouse de Dominique, celle qui n'a "aucune activité professionnelle fixe" (elle a une formation médicale) collabore "occasionnellement" aux côtés (sic) de son député de mari et aux frais des contribuables.

Alors, bien sûr, Dord a pris la précaution (après avoir raturé la feuille pré-imprimée initiale et l'avoir remplacée par une note manuscrite) de préciser que la collaboration de sa femme était "occasionnelle". Ah, la bonne blague! Ça ne veut rien dire, occasionnelle, quand on ne connaît ni la fréquence ni la hauteur du salaire. Et quand on sait que cette déclaration a été rédigée quelques mois après la réélection du député en 2012, on se demande si la collaboration (ou du moins la rémunération) est bien si "occasionnelle" que cela, surtout que Dord ne précise pas le montant du salaire perçu à l'occasion de cette collaboration. Ah, ce goût de la dissimulation..!

Isabelle Dord exerçait-elle réellement les fonctions d'assistante? A-t-elle perçu, depuis que son mari est député, une somme aussi rondelette que Pénélope Fillon? Qu'importe, après tout, ces questions. La preuve est faite que son mari l'a employée, à nos frais, de manière totalement discrétionnaire. Et c'est cela qui est lamentable et d'une rare hypocrisie. Car la semaine dernière, dans une interview (?) accordée à un hebdo local, Dord prétendait que ce dont les gens ne veulent plus ce n'est pas le cumul des mandats mais le cumul d'indemnités. Oh, le tartuffe!

Comment peut-il faire une déclaration aussi péremptoire, lui qui cumule sans vergogne, depuis deux décennies, les indemnités diverses et dont on apprend que, lui aussi, il fait rémunérer son épouse par les contribuables?
Comment le peut-il? Tout simplement parce qu'il croit encore qu'il peut tout se permettre, y compris les plus graves offenses au bon sens, tant ses électeurs semblent dociles et crédules.
Ce qu'il n'a pas encore assimilé, c'est l'exaspération qui monte, qui monte, qui monte... Et qu'un grand coup de balai s'impose, s'impose, s'impose...

On vit une curieuse époque où tout désormais devient possible, y compris le pire... Et l'on en connaît les responsables.

J.G.

NB: Comme son maître Fillon, Dord va peut-être parler, à propos de cet article, de "boule puante".
Mais si il y a de la puanteur dans la vie politique française, l'ex-trésorier de l'UMP, mêlé à l'affaire Bygmalion et ses 18 millions d'euros évaporés, n'y serait-il pour rien?


" La politique, c'est comme l'andouillette. Ça doit sentir un peu la merde, mais pas trop."  (Edouard Herriot)




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