par Jacques Girard
J'ai eu l'occasion de côtoyer puis d'échanger à quelques reprises avec François Bayrou.
La première fois c'était à Chambéry en 2006. A l'invitation de Patrick Mignola, qui avait été l'un de ses collaborateurs à l'UDF, j'assistais à une réunion préparatoire à la prochaine élection présidentielle et à laquelle notre nouveau premier ministre devait participer.
C'était une réunion très UDFienne, très sang triste. On y parlait, longuement, surtout pour ne rien dire. Bayrou écoutait. Je m'étais installé à l'écart, appuyé contre une table. Je devais avoir l'air désabusé. Bayrou est venu vers moi et m'a demandé les raisons de cette attitude. Je m'en suis expliqué. Il m'a écouté. Il m'a laissé son numéro de téléphone personnel en me proposant de garder le contact avec lui. Nous eûmes par la suite quelques échanges téléphoniques, parfois à son initiative.
Je me croyais alors autorisé à préparer ma candidature sous la bannière UDF aux prochaines législatives. J'avais même reçu l'appui de l'ancien député UDF, Gratien Ferrari, pour me présenter contre Dominique Dord. Lequel Dord avait été quelques années plus tôt le suppléant de Ferrari avant de le trahir.
A quelques mois de l'élection présidentielle (qui serait suivie d'élections législatives) Bayrou était passé à Aix les Bains. Cette visite s'était faite en présence constante de D. Dord, maire et député sortant. J'en avais fait la remarque à Bayrou en lui manifestant à la fois ma surprise et ma déception dans un message téléphonique. Le lendemain c'est Bayrou qui me rappelait pour m'expliquer qu'il était tombé, en quelque sorte, dans un piège. J'en avais même rédigé un écho dans le magazine que j'animais alors, l'AIXaspérant:
Pouvais-je croire, dans une grande naïveté, que Bayrou était venu, à son corps défendant, chercher le soutien du député RPR Dord alors que l'UDF allait présenter un candidat contre le même Dord quelques mois plus tard? Pas vraiment, non! Je continuais néanmoins de préparer ma candidature à l'élection de juin 2007 quand G. Ferrari me fit savoir qu'il ne me soutiendrait plus. Au même moment, l'UDF départementale, par la voix de Mignola, fit paraître un communiqué dans la presse pour annoncer que je ne la représentais pas ou plus. A la place, l'UDF désignait un parfait inconnu recruté dans sa campagne (Yan Bezat) qui ne risquait pas de faire de l'ombre à Dord. Et, pour faire plier Ferrari, l'UDF de Mignola avait même demandé à sa nièce d'être la suppléante de l'inconnu Bezat. Je comprenais que le "système" avait repris le pouvoir, que Bayrou avait laissé faire. J'ai maintenu, par principe ma candidature mais n'ai fait aucune campagne et n'ai même publié aucune profession de foi.
La suite? Eh ben Dord fut réélu dès le premier tour, Bezat fit de la figuration avec cette suppléante dont la seule présence avait convaincu Gratien Ferrari de me laisser tomber.
L'UDF de Bayrou était déjà un sacré marigot.
La suite encore? Mignola fut élu député UDF de la 3ème circonscription. Il se sentit pousser des ailes avant de sombrer lui-aussi dans le marigot. Au sommet de sa gloire politicienne il hérita (en 2018) de son père une entreprise florissante avec 200 salariés, entreprise qui fut mise en liquidation un an plus tard (en 2019), Mignola disparaissant à son tour peu à peu dans les limbes de la politique après diverses accusations de malversations qui n'eurent jamais de suites judiciaires réelles.
Ah, un dernier détail: la nièce qui avait poussé G. Ferrari à me planter à deux mois du premier tour s'appelait, et s'appelle toujours, Marina Ferrari.
Un an plus tard, aux municipales de 2008, alors que son tonton avait prévu de la mettre en numéro 2 sur la liste qu'il préparait à Aix, la Marina le trahit et rejoignit la liste de Dord pour y prendre une place d'adjointe. Un Dord qu'elle trahirait bientôt avant de récupérer sa place de député. On connait la suite... Suite provisoire car Qui a vaincu par le glaive périra par le glaive.
Bayrou, l'UDF, ou le Modem, une école, parmi d'autres, qui, à défaut de conviction, forme des traitres et des traitresses.
Et c'est cela qui est aujourd'hui à la tête de notre pauvre France.
Je ne sais pas pourquoi il me revient à l'instant une formule qui m'avait bien fait sourire quand je l'ai entendue. Elle disait:
Ce pays ressemble de plus à un hôpital psychiatrique... Un hôpital dont les fous auraient pris le commandement.
Pas mieux
J.G.