C'EST TELLEMENT FACILE QUAND ON ROULE CARROSSE

PLUS STUPIDE COMME PROJET TU MEURS


Scènes vues et vécues:
Equihen-Plage, sur la côte d'Opale, le jeudi 3 juillet dernier. Une vingtaine de jeunes gens, à l'évidence d'origine africaine, patientent à l'ombre, appuyés sur les murs d'habitation de la rue principale. 

Ils occupent une partie du trottoir tandis que trois ou quatre de leurs congénères font leurs emplettes à la supérette située de l'autre côté de la rue. Nous arrivons à leur proximité. Ils s'effacent gentiment pour nous laisser le passage. Ils sont aimables, souriants, ils sont correctement habillés. Ne seraient-ce leur nombre et leur singularité, ce pourraient. être des touristes. Ils ont une vingtaine d'années en moyenne. Ils ne parlent pas français mais anglais. 
Ils sont très affables. Une discussion peut facilement s'engager. 

Ce sont des "migrants". Ils ont parcouru plusieurs milliers de kilomètres et affronté plein de dangers avant d'arriver sur les côtes de la Manche. Ils n'ont plus que 35 kilomètres d'un bras de mer à franchir pour atteindre leur but de départ: l'Angleterre. 
Est-il utile de leur expliquer que la traversée est dangereuse? Ils n'en on cure. Ils sont proches de leur but, Là-bas, de l'autre côté du Channel, du Détroit, une nouvelle vie les attend. Ils sont tout près de leur destination et pleins d'espoir. Ils ne doutent plus de rien. On se quitte sur leurs bye-bye. Nous, on n'a pas osé un "see you later". 


Le lendemain, vendredi 4 juillet, ces mêmes jeunes embarquent dans un canot pneumatique, direction l'Angleterre. C'est alors qu'une quinzaine de gendarmes interviennent. Pour la première fois ces militaires se mettent à l'eau et empêchent le canot de prendre le large. Pour parvenir à leurs fins les gendarmes vont même jusqu'à crever le canot. Des vidéos tournées par des touristes immortaliseront la scène. Même la BBC s'en emparera. 

C'est la première fois qu'une telle intervention a lieu. D'habitude, c'est simplement à terre que les gendarmes interviennent pour empêcher les embarquements. Une fois en mer les autorités militaires se limitent d'ordinaire à accompagner les frêles embarcations, ne serait-ce que pour récupérer les naufragés. Depuis un an, près d'une centaine de candidats à la traversée y ont perdu la vie.

Suite à l'intervention "musclée" des gendarmes le 4 juillet, la question était donc: pourquoi? Pourquoi maintenant, pourquoi avoir changé de tactique? La réponse est arrivée hier, depuis Londres. C'était pour complaire à macron.



Un macron qui a profité de son accueil chez le roi britannique pour sortir l'une de ces absurdités dont il s'est fait une spécialité et dont on ne sait plus si cela relève de la méconnaissance des dossiers ou de la perversité. Ainsi, peu après un voyage en carrosse royal, celui qui est, hélas, encore le président de la France, a annoncé, tout souriant, la conclusion d'un accord avec le triste sire de premier ministre anglais. On résume cet accord: quand, demain, 300 migrants auront franchi le Channel et auront débarqué en Grande Bretagne, les Anglais pourront nous les retourner et nous devrons les accueillir en France. En échange, les Anglais s'engagent à accueillir 300 autres migrants... A condition qu'ici en France on se soit assurés qu'ils remplissent bien toutes les conditions pour pouvoir être accueillis en Grande Bretagne. En échange de quoi les Anglais nous verseront quelques dizaines de millions de livres. Plus con comme dispositif, on ne pouvait pas trouver.

D'abord parce que ce n'est pas à la France de vérifier si un étranger va obtenir son visa pour l'Angleterre. Ensuite parce que pour être applicable, il faudrait que cette disposition s'applique à toute l'Europe. Et, ainsi, que la France puisse faire retourner en Espagne ou en Italie tous les migrants qui sont passés par ces pays avant de s'installer chez nous. Ensuite encore, parce les migrants qui patientent sur la côte d'Opale pour gagner l'Angleterre n'ont aucune envie de rester en France... Contrairement à d'autres migrants qui, eux, s'accommodent très bien de l'accueil en France et des conditions financières et de logement qui leur sont proposées.

Bref, au moment de conclure cet article, j'éprouve beaucoup de peine à l'égard de ces jeunes hommes dont j'ai croisé la vie pendant quelques instants. Des jeunes hommes qui, après un long et pénible périple, croyaient encore qu'ils allaient bientôt atteindre leur terre promise.
Quant à mon mépris pour le personnage qui joue avec la vie des autres pour sa propre gloriole, il ne fait que croître.

Jacques Girard